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mercredi 2 mars 2011

Les réfugiés continuent à affluer par dizaines de milliers à la frontière tunisienne

Les réfugiés continuent à affluer par dizaines de milliers à la frontière tunisienne sans pouvoir toujours aller plus loin faute de moyens de transports. Le Haut commissariat au réfugiés s'alarme. Le point avec son porte-parole à Paris.


Les réfugiés étrangers qui fuient la Libye continuent à affluer aux frontières tunisienne et égyptienne, au rythme maintenant de 10.000 à 15.000 par jour.
Si l'Egypte semble parvenir à organiser leur évacuation vers leurs pays d'origine, avec l'aide de la communauté internationale, côté Tunisie c'est l'engorgement (lire ici le reportage de notre envoyé spécial).
Le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), dont le bureau à Tripoli a été fermé l'année dernière par le régime mais qui a conservé des relais locaux sur place, a envoyé plusieurs équipes d'urgence à la frontière. Elles y rencontrent une situation alarmante, ainsi que le rapporte William Spindler, porte-parole du HCR à Paris.

La situation est-elle en train de tourner au chaos à la frontière entre la Tunisie et la Libye ?
On a atteint un seuil très critique. On estime maintenant à près de 80.000 le nombre de personnes ayant traversé la frontière depuis le début de la crise. Une grande partie a pu être évacuée mais les moyens de transports restent insuffisants, ce qui provoque une situation de congestion.
La situation empire de jour en jour, on est au bord de la catastrophe humanitaire. La plupart de ces réfugiés sont des travailleurs migrants égyptiens, mais aussi chinois, vietnamiens, nigériens...
Certains avaient des contrats en bonne et due forme dans la construction ou l'industrie pétrolière en Libye, d'autres sont clandestins. Ces hommes – on compte très peu de femmes et enfants, restés au pays – se retrouvent confrontés à des conditions très dures à la frontière: ils dorment pour beaucoup dehors alors que les températures le soir sont glaciales, qu'hier il s'est mis à pleuvoir. Les conditions sanitaires sont très difficiles. Un collaborateur du HCR sur place me disait tout-à-l'heure qu'il comptait 300 personnes dans la queue pour les toilettes.
Et pour l'hébergement, la nourriture ?
La communauté locale sur place est très généreuse, les civils distribuent ce qu'ils ont, l'armée et les autorités tunisiennes font ce qu'ils peuvent, de même que le Croissant-Rouge, mais tous sont dépassées par le nombre.
Le HCR a acheminé 2000 tentes, chacune pour 6 à 8 personnes. Les migrants nous aident à les monter, comme pour beaucoup ils travaillent dans la construction, ils sont efficaces! Deux autres vols devraient arriver demain avec des tentes, des bâches, du matériel de secours. Mais cela ne suffira pas: l'urgence reste bien d'accroître les moyens d'évacuation de toutes ces personnes vers leur pays d'origine.
Nous en appelons à la communauté internationale, qui doit fournir d'urgence des moyens financiers et logistiques massifs, dont des avions, des bateaux et du personnel spécialisé.
Quelles nouvelles avez-vous de vos collaborateurs libyens à Tripoli ?
Une sorte de hotline a été mise en place depuis le bureau de Tripoli. Ils reçoivent de nombreux appels de détresse de réfugiés restés coincés en Libye et qui sont victimes d'attaques, de vols.
Ils sont soupçonnés d'être des mercenaires et se retrouvent pourchassés. Certains racontent que des compatriotes ont été tués. Notre bureau à Tripoli est maintenu ouvert pour eux mais encore faut-il qu'il puissent y arriver.
Le HCR avait enregistré avant la crise 8000 à 9000 réfugiés en Libye, non reconnus comme tels par le régime puisque la Libye n'a pas signé la convention de Genève relative au statut des réfugiés. Il s'agit pour la plupart de Somaliens, d'Irakiens, d'Erythréens, de Soudanais.

L'Italie et la France déclarent s'inquiéter de l'afflux en Europe de centaines de milliers de réfugiés... Est-ce réaliste? Est-ce déplacé?
Jusqu'à présent, ce n'est pas le cas. Ça peut arriver, mais il serait choquant que les pays européens évacuent leurs ressortissants et laissent à leur sort les Yéménites, les Irakiens, les ressortissants d'Afrique subsaharienne qui tentent de fuir la Libye mais que leurs propres gouvernements n'ont pas les moyens de rapatrier.
Il est essentiel de maintenir ouvertes les frontières terrestres, maritimes et aériennes. Cela n'empêche pas que l'on examine dans un deuxième temps les situation de chacun, mais pour l'heure il y a une urgence humanitaire.

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