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vendredi 28 octobre 2011

Tunisie : Rached Ghannouchi rassure et tend la main aux laïcs

Plus d’une conférence de presse, c’est une kermesse pour fêter la victoire, que celle organisée ce vendredi par le mouvement Ennahdha sur les berges du lac. Le cheikh, entouré par son état major au complet, a envoyé des signes d’apaisement et d’assurance aussi bien à  l’intérieur, qu’à  l’extérieur. Son discours a été, à plusieurs reprises, entrecoupé par les applaudissements de ses sympathisants et sympathisantes encore grisés par la joie de cette percée dans les urnes.

Message cardinal : rien ne sera plus comme avant, au niveau des personnes et des politiques notamment, mais Ennahdha ne compte aucunement changer le mode de vie des Tunisiens. "Les citoyens auront à exercer totalement leurs libertés dans la manière de manger, de boire, de s’habiller et de croire…tout cela n’est pas l’affaire de l’Etat", affirme Rached Ghannouchi. A ceux qui n’ont pas voté pour son mouvement, il se lance dans une opération séduction : "je leur dis, apprenez à nous connaître de plus près. Pendant 30 ans, ils n’ont fait que tendre une seule oreille à ceux qui agitaient la peur d’Ennahdha, qu’ils nous tendent leur seconde oreille".

"Ce qui se passe à Sidi Bouzid est douloureux", déplore-t-il en lançant un appel au calme envers la population de la région. "Sidi Bouzid a connu le déclenchement de la première étincelle de la révolution, elle sera prioritaire dans les projets de développement. Ce n’est pas un hasard si Ennahdha a choisi de démarrer sa campagne électorale dans cette région, les habitants de Sidi Bouzid doivent être les plus soucieux de préserver cette révolution,  et d’empêcher que les institutions de l’Etat et les sièges des partis soient incendiés dans leur ville", indique-t-il, accusant "le RCD dissous d’être derrière ces troubles, en propageant des rumeurs fallacieuses imputées à Hamadi Jebali".

Au sujet des listes d’al-Aridha (Pétition populaire), Rached Ghannouchi dit respecter la volonté populaire, qui permet à ces listes d’accéder à l’assemblée constituante. "Ce n’est pas dans les prérogatives d’un parti d’invalider d’autres listes. Nous en tenons à l’ISIE, et nous acceptons ses décisions, celui qui relève une injustice, qu’il saisisse la justice ; notre justice administrative est digne de confiance", admet-il. 

Des femmes voilées et non voilées dans le prochain gouvernement

Autre sujet brûlant, la formation du gouvernement de coalition, objet de tractations entre les partis. D'après le SG du mouvement Hamadi Jebali, une première rencontre a eu lieu hier entre son mouvement et Dr Mustapha Ben Jaâfar, SG d’Ettakatol, pour trouver une plateforme politique consensuelle, sur le programme du gouvernement économique et social. "Le choix du mouvement porte aujourd’hui sur son SG pour diriger le gouvernement après concertations", relève-t-il, confirmant une annonce faite précédemment. "Cela se déroule de la sorte dans toutes les démocraties, le parti vainqueur est celui qui brigue le poste de Premier ministre".  Mais, pour le moment Ennadha se garde de dire s’il cherche à occuper d’autres portefeuilles ministériels, "tout cela sera décidé dans le cadre des concertations, en vue d’aboutir à une formule qui tient compte des équilibres et des résultats des élections", indique Rached Ghannouchi. Mais, on sait d’emblée que le prochain gouvernement sera composé de nouvelle figures, et comptera tant des femmes voilées que non voilées. Rien n’est, néanmoins, encore sûr quant à l’échéance au cours de laquelle le prochain gouvernement sera formé.  "Il faut tout de même activer le processus car le pays a besoin d’une vision claire", recommande le SG d’Ennahdha.  

"Ce n’est pas le programme d’Ennahdha qui sera appliqué, mais il y aura un gouvernement de coalition qui sera formé sur la base de la plateforme établie dans le cadre du collectif du 18 octobre, qui fixe plusieurs aspects de la vie publique dont la relation entre la religion et l’Etat, la liberté de pensée et de culte, la femme"...fait savoir le président du mouvement, sans exclure un  rapprochement avec le parti démocratique progressiste, PDP, qu’il qualifie de "parti ami", qui "a lutté contre la dictature, avec lequel Ennahdha a une histoire commune de militantisme".

Le prochain gouvernement va entamer la réforme de la justice, mais il s’agit là d’un dossier épineux qui nécessite une réforme large, radicale et de longue haleine, note en substance Rached Ghannouchi. Il réitère l’appel de son mouvement pour l’instauration d’une justice transitionnelle,  récusant la vengeance et la vindicte tant envers les membres du RCD dissous, qu’à l’endroit de ceux ayant  appartenu à l’ancien régime. "Il faut que justice soit faite, et que les droits soit restitués à leurs propriétaires".

Le tourisme : un secteur stratégique pour Ennahdha
Le tourisme, un secteur clef pour le mouvement, contrairement à ce que propagent les mauvaises langues. "Le tourisme constitue un secteur stratégique pour l’économie tunisienne et une source de devises", rappelle Hamadi Jebali,  annonçant une rencontre ce jour même avec Mohamed Belajouza président de la fédération tunisienne de l'hôtellerie (FTH). Ennahdha appuie même une idée que tous les professionnels du secteur appellent de leur vœu soit la diversification des produits touristiques, en développant le tourisme de santé, et en aménageant un circuit touristique de la révolution.

Le mouvement encourage aussi les investissements en bourse. "Après l’annonce des résultats des élections, la bourse a chuté, nous nous sommes entretenus avec les représentants de la bourse et nous leur avons affirmé que l’Islam encourage les transactions en bourses, que le mouvement incite les investissements en bourse et ailleurs, et que l’Etat va mettre en place des législations pour promouvoir ces investissement. Suite à cela,  la bourse est remontée de trois points".

"L'épopée historique du peuple tunisien"
Rached Ghannouchi a rendu hommage, au début de son intervention, au peuple tunisien qui a tracé "une épopée historique" en affluant massivement vers les urnes. Il a exprimé l’attachement de son mouvement à la voie réformiste, islamiste et moderniste et a réitéré l’engagement d’Ennahdha pour la voie du dialogue, en récusant la violence sous toutes ses formes. "Car, la violence qu’elle soit au niveau de la pensée ou de la politique, n’est pas le remède mais le mal".

"Le mot d’ordre avec lequel le mouvement est entré dans la vie politique, est le consensus, et nous nous attachons encore au consensus", affirme-t-il. "Il faut que la constitution soit rédigée avec le consensus et le gouvernement doit être dirigé avec consensus. Notre mouvement ouvre son cœur à tous les partisans de la liberté qu’ils soient islamistes ou laïcs et leur tend la main dans le cadre du consensus, de la fraternité et du sens patriotique", martèle-t-il.

Rached Ghannouchi a réitéré l’engagement de son mouvement à respecter les traités et les conventions signés par l’Etat tunisien, à renforcer les acquis de la femme, et sa contribution au processus de  prise de décision politique. Pour preuve, "sur  les 49 femmes qui siègeront à l’assemblée constituante, 42 sont issues d’Ennahdha".

Le mouvement islamiste œuvrera à inscrire la Tunisie "dans sa profondeur civilisationnelle et stratégique, en renforçant ses relations avec le pays maghrébins, arabo-musulmans, et en l’ouvrant sur  son environnement international dont l' Europe et les Etats-Unis".

Un programme vaste que le mouvement islamiste veut inscrire dans la durée. Tout en s’engageant que cette période transitoire ne dépasse pas une année, Ennahdha veut rester aux commandes plus que douze mois, "tant que nous avons la confiance du peuple", précise le cheikh.

Rached Ghannouchi s’est félicité de la levée de l’assignation à résidence de Salah Karkar et son intention de regagner la Tunisie. Quand aux désaccords avec Abdelfattah Mourou, "ils seront réglés un jour"; "Ennahdha n’est pas une organisation, mais un projet, et tous ceux qui portent ce projet sont au cœur du mouvement", dit-il au sujet d’Abdelfattah Mourou, candidat malheureux à l’assemblée constituante.

Dans une déclaration commune, concernant l’élection de l’Assemblée constituante en Tunisie Catherine Ashton, haute représentante de l’Union européenne (UE) pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité, et le commissaire Štefan Füle se réjouissent également «à la perspective de collaborer étroitement avec la nouvelle assemblée et les autorités et institutions tunisiennes pour répondre aux aspirations des Tunisiens à la démocratie, à la liberté, à la justice sociale et à la dignité.» Tout en remerciant la mission d’observation électorale de l’UE (Moe UE) conduite par Michael Gahler «pour son travail et sa contribution à ce processus», Mme Ashton et M. Füle ont affirmé que «les élections tunisiennes ont constitué une première étape encourageante vers la démocratie». Selon eux, ces élections «ont été globalement bien menées, marquées par un consensus politique fort dans un contexte de très grande liberté d’expression et organisées dans la transparence.» «Les citoyens tunisiens ont eu pour la première fois l’occasion de choisir librement et démocratiquement leurs représentants et de déterminer leur propre avenir», notent les responsables européens, ajoutant qu’«il incombe désormais à l’Assemblée constituante fraîchement élue de rédiger la nouvelle Constitution du pays. Elle devra s’atteler à cette tâche fondamentale dans un esprit de consensus afin de construire un nouvel État démocratique.» Mme Ashton et M. Füle n’omettent pas de féliciter le gouvernement transitoire du Premier ministre Caïd Essebsi, les membres de l’Instance supérieure pour la réalisation des objectifs de la révolution et de la réforme politique ainsi que de l’Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie) pour la qualité du travail qu’ils ont accompli «dans cette période cruciale et difficile» de l’histoire du pays.

L’Association Tunisienne de l’Intégrité et la démocratie des élections, a déployé un réseau de 2000 observateurs sur tout le territoire tunisiens et à l’étranger, pour contrôler le déroulement des élections de l’assemblée constituante. A l’issue de cette opération, Moez Bouraoui ainsi que plusieurs autres membres de l’association ont exposé ce matin, le contenu du rapport d’observation. Un rapport partiel, puisque le travail de traitement des bulletins d’observations n’a toujours pas touché à sa fin.

Moez Bouraoui a d’abord déploré le vide législatif au sujet de la société civile et son rôle dans le processus démocratique. La loi électorale telle que statuée par la Haute instance de Ben Achour, ne précise pas les prérogatives de la société civile, et ne protège pas ses droits et son rôle dans le bon déroulement du processus démocratique.

A cinq jours de la date du 23 octobre, l’ATIDE avance un chiffre de 6000 dépassements lors des opérations de vote, observés par ses équipes présentes dans 23 circonscriptions. «Ces dépassements ont concerné 25% des bureaux de vote, et 30% des centres de vote», explique Lilia Rebaï, membre de l’ATIDE.

«Le rapport des élections à l’étranger est presque fini, celui de la Tunisie est en cours. Parmi, les 6000 dépassements relevés, certains ne sont pas très graves, alors que d’autres sont préjudiciables à l’opération électorale, surtout à l’étranger», dit Moez Bouraoui, avant d’ajouter que la loi électorale parle de certaines infractions et pas d’autres. «Nous avons des interrogations pas encore élucidées», relève-t-il. Parmi ces interrogations, comment ont été choisi les personnes ayant géré les bureaux de vote à la date du 23 octobre.

Les infractions relevées par les observateurs sont en rapport avec les conditions de vote et les personnes. Certains isoloirs étaient collés à des fenêtres ouvertes sur l’extérieur. Soit 10% des isoloirs n’étaient pas placés de manière à préserver le secret du vote. Dans 5% des centres  de vote, l’encre indélébile n’a pas été systématiquement utilisée. Dans certains endroits le téléphone portable était permis. Il a même été constaté à la mairie du 11èmpe arrondissement en France, l’absence pendant 30 minutes de la personne qui surveille l’urne. Toujours en France, le superviseur d’un bureau  est rentré chez lui avec l’urne qui n’était fermée que par une bande adhésive.

A Kelibia,  une jeune fille de 16 ans a voté. Il a été également constaté dans certains centres, que des bouts de papiers étaient distribués sur les citoyens qui étaient dans les rangs pour les inciter à voter pour des partis comme l’UPL, Ennadha, ou pour des listes indépendantes. Le rapport de l’ATIDE dénonce aussi plusieurs cas de connivences entre les partis et les membres de bureaux. Ce qui a entraîné notamment la fermeture de certains bureaux  et l’intervention dans certains cas des forces de l’ordre comme à l’Ariana, Ben Arous, Beja, Jbenyana.

Dans le même registre des irrégularités, lors des dépouillements, les PV ne correspondaient pas au contenu de l’urne , et où le nombre de bulletins était supérieur aux nombres de personnes inscrites sur le registre. Lors de cette conférence de presse organisée par l’ATIDE un nombre de photos ont été projetées pour étayer le rapport. Quelques photos montraient des PV raturés et dont les chiffres ont été plusieurs fois rectifiés et l’écriture complètement illisible. «Lors des décomptes dans les centres dédiés à cet effet, les observateurs de l’ATIDE n’ont pas été autorisés à s’approcher des tables. Ils étaient mises à l’écart, ne pouvant regarder que de loin. A quoi servait-il de regarder de loin si l’on ne pouvait pas vérifier les votes», dit Moez Bouraoui.

Il précise qu’au sein de l’ATIDE, il y a actuellement une cellule qui est en train de travailler autour de certains partis, pour connaître leurs sources de financement. « Nous avons à deux reprises demandé à rencontré le gouverneur de la banque centrale de Tunisie, parce que nous avions des points d’interrogation auxquels nous aurions aimé trouver des réponses. Mais nos requêtes sont restées sans écho », dévoile Moez Bouraoui

En conclusion,  il explique que le rôle de l’ATIDE est d’éclairer l’opinion publique et qu’il ne peut en aucun cas se mêler du rôle de la justice ou de l’ISIE dans la prise de décision post-électorale, même si ces décisions peuvent être motivées par des éléments cités dans ledit rapport.

L’union européenne se félicite du succès des élections tunisiennes

L’Union européenne prend «bonne note des résultats préliminaires de l’élection» tunisienne, salue «les candidats et les partis qui ont pris part à ce processus démocratique» et félicite le parti Ennahdha, «qui a recueilli le plus grand nombre de voix». 

Dans une déclaration commune, concernant l’élection de l’Assemblée constituante en Tunisie Catherine Ashton, haute représentante de l’Union européenne (UE) pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité, et le commissaire Štefan Füle se réjouissent également «à la perspective de collaborer étroitement avec la nouvelle assemblée et les autorités et institutions tunisiennes pour répondre aux aspirations des Tunisiens à la démocratie, à la liberté, à la justice sociale et à la dignité.»
Tout en remerciant la mission d’observation électorale de l’UE (Moe UE) conduite par Michael Gahler «pour son travail et sa contribution à ce processus», Mme Ashton et M. Füle ont affirmé que «les élections tunisiennes ont constitué une première étape encourageante vers la démocratie». Selon eux, ces élections «ont été globalement bien menées, marquées par un consensus politique fort dans un contexte de très grande liberté d’expression et organisées dans la transparence.»
«Les citoyens tunisiens ont eu pour la première fois l’occasion de choisir librement et démocratiquement leurs représentants et de déterminer leur propre avenir», notent les responsables européens, ajoutant qu’«il incombe désormais à l’Assemblée constituante fraîchement élue de rédiger la nouvelle Constitution du pays. Elle devra s’atteler à cette tâche fondamentale dans un esprit de consensus afin de construire un nouvel État démocratique.»
Mme Ashton et M. Füle n’omettent pas de féliciter le gouvernement transitoire du Premier ministre Caïd Essebsi, les membres de l’Instance supérieure pour la réalisation des objectifs de la révolution et de la réforme politique ainsi que de l’Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie) pour la qualité du travail qu’ils ont accompli «dans cette période cruciale et difficile» de l’histoire du pays.

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Mohamed Aziz Fetni écrit – Ettakatol n’a pas eu le temps d’assimiler les résultats de l’élection à l’assemblée constituante. Il est déjà devant un dilemme: doit-il ou non gouverner avec Ennahdha”?

Ettakatol est un parti qui a toujours été constant dans son discours, cette constance a fait de lui le parti qui inspire le plus confiance sur la scène politique tunisienne.
Quel gouvernement post-élection ?
Au fur et à mesure de l’avancement de la campagne électorale, et de par sa lecture de la situation, Ettakatol pensait vraiment qu’aucun camp n’aurait la majorité, d’où l’idée d’un gouvernement d’intérêt national composé de tous les partis présents à l’assemblée nationale constituante. Cette idée fort séduisante plaçait l’intérêt de la nation au-dessus de toute lutte partisane, qui risquait de plonger le pays dans une grave crise politique.
Maintenant que les résultats sont à peu près connus et qu’Ennahdha paraît être le parti dominant de cette élection, nous ne pouvons plus parler d’un gouvernement d’intérêt national, car sous cette appellation, l’équilibre des forces politiques en son sein en est la pierre angulaire. Or, aujourd’hui, et ceci est tout à fait légitime, Ennahdha semble prendre l’initiative de former ce nouveau gouvernement. D’ailleurs, l’un de ses membres, en l’occurrence Hammadi Jebali, a déclaré publiquement son intention de postuler à la présidence de celui-ci.
Y aller ou pas ?
Evidemment, dans une manœuvre purement politicienne, Ennahdha continue de qualifier ce futur gouvernement de gouvernement d’union nationale, étant également dans une période de séduction tant sur le plan local qu’international, le parti islamiste a tout intérêt à avoir au sein de son gouvernement des partis démocrates modernistes qui prônent des valeurs de démocratie de liberté. Mais force est de constater qu’Ettakatol a tout à perdre et rien à gagner s’il devait intégrer ce gouvernement, car en cas d’intégration, Ettakatol serait isolé au sein de la famille démocrate, et il risque d’y participer seul, les autres partis ayant déclaré publiquement leur refus d’intégrer un gouvernement d’union nationale avec Ennahdha. Il risque donc une défection en masse de ses adhérents qui assimileront cette intégration à une alliance.
Or, le parti a crié haut et fort le contraire tout au long de la campagne électorale ; et enfin le bilan de ce gouvernement, s’il s’avère positif, serait mis au crédit d’Ennahdha ; et si c'est le contraire, Ettakatol en endosserait une part de responsabilité.

Le futur premier ministre divise les Tunisiens | No 2 du parti islamiste Ennahda, Hamadi Jebali devrait diriger le prochain gouvernement

Au front, il porte la «tabaa», la marque foncée de prosternation qu’arborent certains musulmans. Avant d’être secrétaire général du parti islamiste Ennahda, Hamadi Jebali fut ingénieur et journaliste, directeur de l’organe du parti islamiste,

Al Fajr

. Il est aujourd’hui pressenti pour être le nouveau premier ministre, après la victoire de son parti aux élections pour l’Assemblée constituante.
Selon les résultats officiels, Ennahad disposera de 90 élus sur 217, alors les quatre principales formations de la gauche – le Congrès pour la République, Ettakatol, le Parti démocrate progressiste et la coalition du Pôle démocratique moderniste – en totaliseront 73, les sièges restant revenant à de petites formations ou à des indépendants.
Avec Rached Ghannouchi, Hamadi Jebali est l’un des fondateurs du Mouvement de la tendance islamique (MTI) en 1981, qui changera de nom au bout de huit ans pour devenir Ennahda (la «renaissance»).
Le numéro deux du parti gagnant du premier scrutin libre de Tunisie est originaire de Sousse, la ville côtière à l’est du pays. Sous le régime de Ben Ali, il est arrêté à deux reprises au début des années 1990, au moment où la répression contre les islamistes se fait la plus féroce.
Selon un politologue qui préfère garder l’anonymat, le nom de Hamadi Jebali n’était pas connu de la majorité des Tunisiens avant la révolution. Ceux-ci s’étaient «complètement désintéressés du jeu politique et surtout d’Ennahda dont ils se méfiaient à cause de la propagande du régime». Jusqu’au 14 janvier et le retour dans la vie politique du parti – légalisé en mars –,
Hamadi Jebali n’avait pas la renommée de Rached Ghannouchi, réfugié en Angleterre.
Après la révolution, Jebali s’est rendu aux Etats-Unis accompagné de deux autres cadres du mouvement, l’avocat Samir Dilou et Nourredine Bhiri, membre de l’Exécutif, et y aurait rencontré de hauts responsables américains.
S’il est souvent présenté comme le visage ouvert et rassurant du parti islamiste, ou encore comme l’interlocuteur privilégié des occidentaux, Radhia Nasraoui, avocate et militante des droits de l’homme ne partage pas cette analyse. Pour celle qui a défendu de nombreux islamistes sous le régime de Ben Ali, «Hamadi Jebali est connu en Tunisie comme faisant partie de l’aile la plus conservatrice d’Ennahda». Interrogé récemment sur la question d’une possible réforme de la question de l’héritage (en Tunisie la femme reçoit la moitié de l’homme), Hamadi Jebali aurait, selon une journaliste présente, «réagi de manière assez agressive».

TUNIS - Tunisie: les islamistes d'Ennahda s'engagent à "construire un régime démocratique"

TUNIS - Vainqueurs des premières élections libres en Tunisie, les islamistes d'Ennahda ont insisté vendredi sur leur engagement démocratique, mais des violences ont éclaté dans la ville symbole de la révolution, Sidi Bouzid.
"La démocratie, c'est pour tout le monde", a assuré devant la presse à Tunis le chef d'Ennahda, Rached Ghannouchi, qui a tendu la main à toutes les forces du pays.
Ennahda dispose de 90 élus sur 217 au sein de la nouvelle assemblée constituante issue de l'élection du dimanche 23 octobre.
Il devance les quatre principales formations de la gauche tunisienne --le Congrès pour la République (CPR), Ettakatol, le Parti démocrate progressiste (PDP) et la coalition du Pôle démocratique moderniste (PDM)--, qui totalisent 73 sièges.
Les autres sièges reviennent à des partis de moindre importance ou des indépendants.
"On demande à tous nos frères, quelles que soient leurs orientations politiques de participer à l'instauration d'un régime démocratique", a poursuivi M. Ghannouchi.
"La révolution n'a pas eu lieu pour détruire un Etat, mais pour détruire un régime. Nous sommes déterminés à protéger l'Etat tunisien", a-t-il affirmé.
Dans le même temps, un couvre-feu a été ordonné à Sidi Bouzid (centre), où la mort d'un vendeur ambulant en décembre 2010 avait lancé la révolution tunisienne.
La permanence d'Ennahda et plusieurs bâtiments administratifs, dont la municipalité et le tribunal, ont été mis à sac et pillés après l'annonce des résultats de l'élection.
Les manifestations se poursuivaient vendredi et M. Ghanoucchi, qui a lancé un appel au calme, a affirmé voir dans ces troubles "la main du RCD dissous", l'ancien parti du président Zine El Abidine Ben Ali.
Les protestataires contestent l'invalidation par la commission électorale de la liste "Pétition populaire" de l'homme d'affaires tunisien Hechmi Haamdi, vainqueur dans cette circonscription, sa région natale.
Les islamistes, interdits, persécutés, emprisonnés ou condamnés à l'exil par la dictature de Ben Ali, se retrouvent en position de force dans la future assemblée qui va devoir s'atteler à l'élaboration d'une nouvelle constitution.
Les tractations entre les partis ont commencé peu après le scrutin de dimanche mais ne pourront formellement aboutir qu'après la première convocation de la nouvelle assemblée élue, qui devra d'abord nommer un nouveau président de la République, qui, lui-même, désignera le Premier ministre.
Ennahda a d'ores et déjà indiqué que son numéro deux, Hamadi Jebali, 62 ans, qui a passé seize années de sa vie en prison --dont 10 à l'isolement-- était candidat à la direction du gouvernement.
Compte tenu des inquiétudes que suscitent en Tunisie et à l'étranger l'accession au pouvoir des islamistes, "il leur appartient désormais de rassurer le pays", souligne vendredi le quotidien "La Presse".
Ennahda accède à la tête de l'Etat sans majorité absolue et "c'est tant mieux!" se félicite le quotidien car, ajoute-t-il, "ses dirigeants auront à exercer le pouvoir avec l'obligation de toujours expliquer et de justifier leurs propositions ou décisions".
"La Presse" s'interroge sur la capacité d'Ennahda à tenir ses engagements quant au respect des acquis démocratiques (statut de la femme, libertés fondamentales, etc) "si la base ou les doctrinaires religieux exigent d'être plus énergiques et d'arrêter les compromis".
M. Ghannouchi a réaffirmé son "engagement envers les femmes de Tunisie pour renforcer leur rôle dans la prise de décision politique, afin d'éviter toute marche arrière sur leurs acquis". 42 des 49 femmes élues au sein de la nouvelle assemblée sont membres de son parti, a-t-il souligné.
Mais, pour "La Presse", les dirigeants islamistes "doivent savoir que s'ils renient leurs engagements (...), ils trouveront en face d'eux une société tunisienne mûre, responsable et consciente de ses intérêts et de sa force".

La Tunisie a flirté avec la démocratie directe

Ceux qui n’ont pas vécu de l’intérieur l’expérience révolutionnaire tunisienne et égyptienne ne peuvent imaginer malgré toute leur bonne volonté l’ampleur de la métamorphose. Le bouleversement a plus transformé les esprits qu’il n’a modifié d’une manière radicale les apparences. C’est pour cette raison qu’un tel phénomène est difficilement quantifiable. En l’espace de quelques heures, quelque jours, des hommes et des femmes ont subitement mué. Des sujets qui pendant de longues décennies ont mené une existence politique presque végétative prennent soudain conscience qu’ils sont des citoyens, qu’ils sont les vrais maîtres de la cité. Voila que toutes les places dans les villes et dans les villages se transforment en agoras et que les nouveaux maîtres, maîtres de leur propre destin, dictent dans l’euphorie mais avec détermination leurs quatre volontés, directement, sans intermédiaires et sans représentants hypocrites. Oui, les révoltes tunisienne et égyptienne se sont faites sans leaders et sans encadrement même si après coup syndicats et formations politiques s’y sont ralliés. Soulèvements populaires purs, sans souillures politiciennes ni compromis, ils ressemblent plus à un hymne à la démocratie qu’à un mouvement organisé. Stupéfait, le monde assiste à travers les écrans à l’impossible exploit de peuples pacifiques, armés de leur seule volonté déposer leurs despotes.
En Tunisie, après la fuite du dictateur, un peu partout dans le pays, des bandes de barbouzes au service du RCD et des clans rivaux s’étaient mises à saccager et à incendier municipalités, sous-préfectures, tribunaux, recettes des finances et même des écoles primaires. Leurs but était en même temps de détruire des archives compromettantes et de provoquer le désarroi parmi les habitants . La Tunisie était en feu. La police pourtant pléthorique à l’époque de Ben Ali a totalement disparu. Face au danger, un miracle se produit : la population au lieu de paniquer a pris spontanément son destin en mains. Des gens nés et nourris au sein des dictatures, totalement apolitiques, se mettent à s’autogérer comme si la chose politique s’apparentait plus à l’inné qu’à l’acquis. Je n’ai pu alors m’empêcher de penser que plus les institutions sont organisées et fortes plus l’individu perd le sens du politique. Cette quasi vacance du pouvoir au lieu d’instaurer la loi de la jungle a au contraire permis l’éclosion des solidarités. Des comités de quartiers poussent un peu partout, des jeunes et des moins jeunes, armés de gourdins, de barres de fer ou même de vieux amortisseurs, dressent des barrages à tous les carrefours et sur toutes les routes. Les voisins se découvrent soudain, des cercles se forment, les uns sortant de chez eux des chaises, les autres distribuant des rafraîchissements, des gâteaux... et les veillées se prolongent tard dans la nuit. Cadres, ouvriers, commerçants, étudiants discutent d’égal à égal de politique, rien que de politique. Dire que quelques jours auparavant ils n’avaient droit qu’au Foot, un sujet devenu presque obscène pendant ces jours de grâce. Les barrages dressés jour et nuit ont fini par mettre en échec le plan de la contre-révolution fasciste même si plusieurs personnes y ont laissé la vie. Personne ne mesurait le danger, les enfants, entêtés, se mêlaient aux adultes qui assuraient la garde. Et je me demandait si c’est l’euphorie de la liberté ou celle de la convivialité, de la solidarité retrouvée qui rendait les gens si héroïques. Lorsque le calme commençait à revenir, les adultes laissaient faire les tout jeunes qui plein de zèle arrêtaient les voitures, ouvraient les portières, regardaient sous les sièges. Tout le monde se laissait faire même les taxis qui se font arrêter quatre ou cinq fois lors d’une seule course. Tous étaient conscients du rôle salvateur que jouait ce service de sécurité assuré par la masse anonyme des citoyens...par le peuple au service du peuple. Un fait plaisant que je n’oublierai jamais : quelques semaines après la fuite de Ben Ali, la police a commencé de nouveau à montrer le bout de son nez. Des petits jeunes assurant la garde d’un barrage tout près de chez moi arrêtent un fourgon de la police et inspectent la cabine, les agents se laissent faire ; mais lorsque les jeunes demandent à vérifier l’arrière du fourgon, l’un des deux agents, hors de lui, se met à vociférer et à pourchasser les enfants qui détalaient à toutes jambes...Tout le monde rigolait. Il est vrai que l’un des acquis important de ce soulèvement populaire est cette démythification de la police. Je me dis, il y a au moins ça de gagné.
Ce qui mérite d’être souligné, c’est cette population qui en l’absence de tout encadrement parvient pendant des semaines à assurer sa sécurité pourtant si menacée, à lever les ordures, à nettoyer les rues...La plupart des préfets et sous-préfets fraîchement nommés par le gouvernement provisoire sont hués par les foules et déguerpissent sans demander leur reste. Le premier ministre Md. Ghanouchi en personne n’a pu résister à la pression citoyenne et a fini par démissionner. L’histoire ne manquera pas de marquer d’une pierre blanche le rassemblement de tous ces jeunes diplômés en chômage venu de l’intérieur et campant jour et nuit place du gouvernement à la Casbah. L’éloquence éblouissante de tous ces tribuns de la plèbe charmait l’assistance qui buvait goulûment leurs mots étincelants. Qu’on ne me parle d’élitisme ! Au tiers monde, il marche plutôt sur la tête. En écoutant ces jeunes orateurs, on mesure à quel point nous avons toujours été assujettis au règne des médiocres.
Mais le rêve n’a que assez duré. M. Béji Caïd Sebsi, ancien ministre de l’intérieur de Bourguiba, encensé par la France et les États Unis, devient le nouveau premier ministre provisoire. Il a vite fait de se plier à l’exigence populaire réclamant l’élection d’une assemblée constituante et réussit ainsi à baisser la pression. Il a ensuite oeuvré pour remettre sur pied le RCD légalement dissous en octroyant des visas à une quarantaines de partis clones. Toute contestation ou manifestation à caractère politique est sévèrement réprimée. Tous ces jeunes contestataires qui avec leur sang et leur souffrance ont fait la révolution sont renvoyés dans leurs provinces. La honte est que le gouvernement provisoire n’a pas cru bon prendre en charge ces blessés et mutilés qui ont payé cher leur opposition à la dictature. Les partis de l’opposition réagissent à peine à ces exactions, hypnotisés semble-t-il par l’appât des élections. L’ordre immuable du couple état centralisé, partis d’opposition a vite fait de prendre le dessus. "L’élite", tous ces professionnels de la politique ont horreur de l’ordre populaire. Pourtant l’expérience de plusieurs semaines de démocratie directe embryonnaire fournit la preuve que des formes plus démocratiques de gestion du politique sont possibles. La participation de tous à la définition d’un vivre ensemble, en dehors des seules institutions représentatives, voilà peut être l’apport le plus précieux de ce soulèvement.
Malgré la confusion entretenue pendant des mois par le pouvoir, la population au lieu d’être découragée, s’est dirigé en masse vers les urnes déjouant ainsi les plans ourdis par la contre-révolution. Pour la première fois de son histoire, le peuple chasse légalement la dictature et choisit ses élus. En ce moment crucial, peu importe qui l’emporte, ce qui compte est la mise en marche de la mécanique démocratique. Les élections prochaines auront raison de toute déviation.
Tout semble maintenant rentrer dans l’ordre. C’est à l’élite partisane d’occuper le devant de la scène et c’est au peuple de déléguer son pouvoir. On est loin des premiers jours de la révolution où le peuple dictait ses choix et organisait son quotidien. Des questions me brûlent : Est-il nécessaire que cette démocratie naissante emboîte le pas à toutes ces démocratie représentatives occidentales à l’agonie ? Faut-il que nous soyons toujours habités par ce mimétisme aveugle qui caractérise tant l’élite du Tiers-monde ? Et je me mets à rêver d’Athènes débarrassée de ses tyrans qui entre le VI et IV siècle a opté pour la démocratie directe en rejetant toute forme d’élitisme. Le tirage au sort des représentants qui venant de milieux différents et n’exerçant qu’une seule fois et pour une courte période ne peuvent en aucun cas former une élite. Le peuple adopte lui-même les lois et décisions importantes et se donne le droit de révoquer à tout moment ses mandataires. Cette gouvernance reposant sur une rotation continuelle du pouvoir empêche le développement des aristocraties qui finissent toujours par dégénérer en oligarchies.
Accepter l’élitisme c’est renoncer à la démocratie. Bernard Manin, dans son ouvrage Principes du gouvernement représentatif, met en lumière l’actuel paradoxe du gouvernement représentatif : « le rapport entre les représentants et les représentés est maintenant perçu comme démocratique, alors qu’il fut conçu en opposition avec la démocratie ». Les révolutionnaires français de 1789 n’avaient pas comme idéal l’auto-gouvernement du peuple mais l’aristocratie élective. Les démarches politiques participatives (telles que le tirage au sort) ont été écartées au profit d’une démocratie représentative dont l’horizon s’est progressivement élargi au suffrage universel. En réalité, Le système représentatif s’est imposé depuis le XVIIIème siècle afin d’exclure le peuple du gouvernement au profit d’une élite. Cette forme de gouvernance élitiste est présentée aujourd’hui par l’idéologie bourgeoise occidentale comme étant l’expression parfaite de la démocratie : un pur mensonge. Il y a plus de deux siècle, Rousseau dénonçait déjà ce système par lequel le représentant fini toujours par usurper le peuple souverain. Les électeurs dans les pays de l’Union Européenne l’apprennent à leur dépend lorsqu’ils constatent que leurs élus nationaux font allégeance aux multinationales et aux banques privées et se rendent complices de ceux qui font leurs malheurs. En d’autres temps ceci aurait été considéré comme un crime de haute trahison. Cette dérive n’a rien de conjoncturel, elle est au contraire inhérente à ce système de gouvernement. Cependant, une telle aliénation devient plus visible avec la forte poussée du néolibéralisme qui a totalement assujetti le politique à l’économique. La mobilité du capital trahit de manière plus voyante la soumission des élus nationaux aux diktats des finances internationales. Nous vivons en effet à une époque où le politique en tant qu’expression de la souveraineté du peuple est mort de sa belle mort.
L’élan révolutionnaire conjugué à la fraîcheur des partis politiques offre à la Tunisie cette chance inouï de penser autrement la démocratie. Bien entendu, ceci ne serait possible qu’une fois les intellectuels de ce pays seront débarrassés de ce mimétisme aveugle qui pousse une bonne partie d’entre eux à singer le modèle occidental. Cette première révolution du XXIème siècle comme on se plaît à le répéter se doit d’être conséquente et assumer un rôle pionnier. Une assemblée constituante ouverte à toutes les sensibilités politiques devra avant tout se prémunir contre les dérives de la démocratie représentative et tendre vers une vraie démocratie. Si la démocratie directe est souvent considérée comme anachronique, la démocratie participative attire de plus en plus d’adeptes à travers le monde. Il s’agit de brider au maximum le pouvoir des élus en rapprochant le processus de décision des citoyens et en favorisant l’émergence d’une démocratie de proximité. Décentralisation, votations, référendums et participation citoyenne à la gestion des communes se dresseront tel un rempart face à la dégénérescence élitiste. Des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent en France et appellent à une nouvelle constitution. Et si les tunisiens leur montraient le chemin...qui sait !...
Dans L’Express du 25 octobre, Christophe Barbier en parfait éditocrate ne semble pas partager tout à fait mon point de vue. Il s’affole même : "...Et si nous avions fourni, enfants béats de Danton et de Rousseau, le moteur démocratique au véhicule islamiste ?... " Votre moteur qui pouffe, pétarde et vous enfume et qui risque à tout moment de vous exploser à la figure, on n’en a cure cher monsieur...On préfère regarder ailleurs. Quant à votre épouvantail islamiste, depuis le temps que vous l’agitez, il part en lambeaux. En parfaits pompiers pyromanes, vous avez inventé le choc des civilisations et poussé malgré lui le monde musulman à défendre son dernier carré identitaire. Mais tranquillisez-vous, les partis islamiques ne sont après tout que des partis politiques. Les tunisiens qui ont su faire fuir votre ami Ben Ali, sauront congédier ceux qui les servent mal.
Fethi GHARBI

mercredi 26 octobre 2011

Tunisie : Ennahdha accentue son avance et désigne Hamadi Jébali pour diriger le gouvernement

Les jeux semblent pratiquement faits dans le scrutin du 23 octobre dont  le parti Ennahdha  sort le grand vainqueur, accentuant nettement son avance sur les autres listes. Les  résultats officiels partiels annoncés dans la soirée après moult reports ne devraient pas changer quoi que ce soit à la nouvelle donne politique en Tunisie.
D’autant moins que cette « déferlante » nahdhaouie est unanimement regardée comme irréversible. A un point tel que le mouvement islamiste prépare déjà son accession à la prochaine assemblée constituante et législative en désignant son candidat au poste de premier ministre en la personne de son secrétaire général, Hamadi Jébali , au motif , dit-il, que "le secrétaire général du parti qui remporte la majorité aux élections, dans toutes les démocraties du monde, occupe le poste de chef de gouvernement".
Bien plus, ajoute-t-il dans  un entretien avec l'agence TAP,  le parti Ennahdha a aussi ses candidats à la présidence qu'il va proposer aux autres partenaires politiques représentés à l'assemblée nationale constituante.
Parmi les postulants à la magistrature suprême de la Tunisie, Il a cité le secrétaire général d'Ettakattol (Forum démocratique pour le travail et les libertés -FDTL), Mustapha Ben Jaâfar et le président du Congrès pour la République (CPR), Moncef Marzouki, sans exclure que le poste de président soit également proposé au Premier ministre du gouvernement de transition, Béji Caïd Essebsi.
Comme on peut le voir, l’architecture du pouvoir sous la férule d’Ennahdha commence à prendre forme sans cependant que soient tirées nettement au clair les orientations de la nouvelle équipe qui aura à gouverner la Tunisie, au moins pendant une année, période fixée pour l’élaboration et la finalisation de la constitution de la 2ème République en même temps que pour la mise en œuvre des actions d’ordre politique, économique et social à la faveur desquelles il est espéré de congédier les effets induits par la Révolution du 14 janvier.
En attendant, il est patent que ce tournant dans l’histoire contemporaine de la Tunisie a permis de réaliser quelques acquis dont il importe de citer l’émergence d’un pluralisme par des moyens pacifiques, l’organisation d’élections dont les résultats sont acceptés par l’essentiel des partis politiques y ayant participé, et enfin la réunion des conditions pour l’instauration d’un contrat social.
Pour autant, le nouveau vainqueur du scrutin, en l’occurrence Ennahdha peut-il revendiquer à juste titre ce « raz-de-marée » dont il est question parmi ses troupes. Selon une analyse faite par l’agence Sigma, les résultats de la consultation électorale ont montré que le taux de participation global par rapport aux 7,2 millions d’électeurs potentiels n’est pas aussi important qu’on le soutient, ce qui , au final, doit vouloir dire que le parti le plus important à l’assemblée constituante ne représente que le quart de la population, autrement dit, un Tunisien sur quatre s’est prononcé pour Ennahdha. 
En tout cas, l’architecture de la constituante devrait prendre la physionomie suivante , selon les projections de Sigma :

Tunisie - L'aide à la Tunisie sera conditionnée au respect de la démocratie (Juppé)

Le chef de la diplomatie française Alain Juppé s'est dit mercredi "optimiste" après les élections en Tunisie, tout en conditionnant l'aide du G8 à ce pays au respect des valeurs démocratiques.

"Nous allons mettre en place une aide économique massive à la Tunisie", a déclaré Alain Juppé sur France Inter, rappelant que le G8, réuni fin mai à Deauville, s'y était engagé.

"Naturellement, cette aide, nous l'apporterons dans la mesure où les lignes rouges ne seront pas franchies. Je pense que c'est important d'avoir cette conditionnalité", a déclaré M. Juppé.

Le respect de l'alternance démocratique, des droits de l'homme, de l'égalité hommes-femmes font partie de ces lignes rouges, a-t-il détaillé. En matière d'égalité entre les sexes, "la société tunisienne est très évoluée et il serait absolument dommageable qu'on fasse marche arrière. Donc on va être très vigilants et nous avons les moyens d'exprimer cette vigilance", a dit le ministre.

Outre la Tunisie, ce "partenariat de Deauville" concerne aussi l'Egypte, le Maroc et la Jordanie.

"Mais moi, a-t-il poursuivi, je vais être optimiste sur la Tunisie. On ne va pas se plaindre qu'il ait eu des élections. (...) Il y a eu des élections libres, il n'y a pas eu de tricherie (...) et le peuple tunisien s'est exprimé. Nous devons respecter ce suffrage".

"Il y a des forces démocratiques en Tunisie qui vont se développer, s'organiser", a-t-il donné comme raison d'espérer.

"Et puis il ne faut pas stigmatiser en bloc les Frères musulmans ou les partis islamiques, ce n'est pas le diable. Il y a parmi eux des gens qui sont des extrémistes et ça on n'en veut pas. Mais il y a des gens tout à fait modérés", a affirmé Alain Juppé.

Le modèle turc de l'AKP, le parti gouvernemental de la justice et du développement, "qui se réfère à l'islam mais qui respecte les grandes règles du jeu démocratique, est aujourd'hui (celui) que suivent les Tunisiens et qu'invoquent même les Libyens", a-t-il souligné.

"Tout est risqué dans une révolution mais je crois qu'il faut faire confiance et être vigilants", a-t-il redit.