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samedi 5 novembre 2011

Tunisie : avocats et magistrats exigent l'indépendance de la justice

La nouvelle Assemblée constituante tunisienne, fraîchement élue le 23 octobre dernier et dominée par les islamistes d’Ennahdha, devra composer avec une magistrature qui a soif d’indépendance.
Roudha Laabidi, présidente du Syndicat des magistrats depuis sa création le 14 janvier dernier (jour de la chute du gouvernement de Zine el-Abidine Ben Ali), le clame haut et fort : « tous les Tunisiens réclament l’indépendance de la justice ». Plus qu’un souhait, c’est une véritable exigence dont Mme Laabidi se fait le porte-voix : « nous voulons l’indépendance du parquet vis-à-vis du ministère de la Justice ».
Sous Ben Ali, les procès demeuraient sous la coupe de l’exécutif : un état de fait qui a toujours été fortement contesté par la population. À charge désormais pour le Syndicat des magistrats, qui regroupe la presque totalité de la magistrature tunisienne (1 300 sur 1 800 postes) de faire valoir ses droits devant les députés.
Élection du Conseil supérieur de la magistrature
Celui-ci réclame tout d’abord un renforcement sine die du rôle du Procureur général comme « première autorité du parquet pour une véritable séparation des pouvoirs ». Autre exigence : les membres du Conseil supérieur de la magistrature devront être « élus et non plus désignés » par le président de la République.
Ces réformes, qui seront soumises à l’approbation de la nouvelle assemblée, sont appuyées par l’Association des magistrats tunisiens (AMT), jusqu’alors seule autorité de défense de la magistrature sous la dictature de Ben Ali. Mme Kalthoum Kannou, une magistrate célèbre pour avoir longtemps été victime des persécutions du régime, a été nommée à sa présidence.
Les réclamations du Syndicat, également soutenues par le barreau des avocats tunisiens, visent également à augmenter la place du judiciaire dans la future constitution tunisienne : « L'ancien texte constitutionnel de 1959 ne réservait que 4 articles au judiciaire contre 17 au législatif et 27 à l'exécutif », affirme Mme Laabidi.
Liste secrète
S’il s’agit « d’une demande légitime », selon Me Saïda Akremi, ce combat pour l’indépendance de la justice doit aussi passer par la dénonciation des magistrats acquis à la cause de Ben Ali des années durant. Mais la liste des noms de ces derniers, restée secrète, ne sera divulguée qu’à la mise en place du nouveau gouvernement, dont le Premier ministre devrait être prochainement désigné par les membres de l’Assemblée constituante.
En février dernier, le gouvernement intérimaire était resté sourd aux réclamations de l’Association des magistrats tunisiens (AMT). À la démocratie de trancher désormais.

Les femmes laïques veulent faire entendre leur voix en Tunisie

Les Tunisiennes laïques sont bien décidées à faire entendre leur voix et à défendre leur mode de vie occidental face à la montée du parti islamiste Ennahda, arrivé largement en tête des premières élections libres organisées dans le pays.
Réunies au sein d'organisations, ces femmes ont entamé une intense campagne de lobbying auprès des partis politiques pour défendre les droits des femmes et notamment une loi de 1956 qui consacre l'égalité entre les hommes et les femmes en Tunisie.
Mercredi, elles étaient un demi-millier à manifester devant le siège du gouvernement à Tunis pour défendre leurs acquis, menacés selon elles par certains mouvements fondamentalistes musulmans. Elles ont été brièvement reçues par le Premier ministre par intérim, Béji Caïd Essebsi.
"Nous sommes ici pour dénoncer toutes les formes d'extrémisme et d'entraves aux libertés des femmes", a expliqué l'une des manifestantes, Madiha Bel Haj. "Nous voulons une constitution qui respecte les droits des femmes et ne revienne pas sur les acquis que nous avons obtenus."
En attendant, et malgré les promesses répétées des principaux partis politiques qui se sont engagés à ne pas rogner sur les droits des femmes, les organisations ne baissent pas la garde et restent vigilantes face à toute forme de dérive.
Plusieurs professeurs d'université ont ainsi observé jeudi une grève pour protester contre l'agression d'enseignantes par certains fondamentalistes qui les jugeaient trop peu vêtues.
CODE DU STATUT PERSONNEL
Au coeur des inquiétudes de ces militantes laïques, une éventuelle réforme du Code du statut personnel, une série de lois introduites par le père de l'indépendance, Habib Bourguiba, en 1956.
Ce code abolit notamment la polygamie et accorde aux femmes les mêmes droits que les hommes en cas de divorce et de mariage.
"Je suis venue ici pour soutenir l'idée que le Code du statut personnel et les droits de femmes devraient être inscrits dans la nouvelle constitution", a indiqué Mounira, lors de la manifestation de mercredi.
Face aux inquiétudes internationales et intérieures sur une domination de l'intégrisme islamiste, Ennahda et les autres partis politiques siégeant au sein de la nouvelle assemblée ont assuré que la défense des droits de l'homme serait renforcée dans la nouvelle constitution.
Mais certaines voix s'élèvent déjà parmi les laïcs pour s'inquiéter du nombre d'élues issues d'Ennahda.
Sur les 49 femmes siégeant dans la nouvelle assemblée constituante, 42 sont membres de la formation islamiste réputée modérée. Rachid Ghannouchi, qui a fondé Ennahda en 1989, assure que sa formation respecte la parité homme-femme plus que n'importe quel autre parti politique du pays.
"Le principe d'égalité est plus respecté à Ennahda que dans les partis laïques", a-t-il dit à Reuters. "Ces femmes (les élues d'Ennahda) vont se battre pour défendre leurs droits. Les femmes laïques ne monopoliseront pas la définition des droits des femmes."
Le voile islamique, qui a été interdit dans les écoles et les administrations publiques sous le régime de l'ancien président Zine ben Ali, est devenu le symbole de la forte divergence des points de vue entre femmes laïques et islamistes.
L'interdiction du voile a été levée depuis la révolution de janvier qui a chassé l'ancien président du pouvoir. Depuis, les Tunisiennes laïques réclament des garanties du pouvoir sur le fait que son port ne deviendra pas obligatoire. Les islamistes, elles, demandent à l'inverse à pouvoir continuer à le porter à tout moment.

mercredi 2 novembre 2011

LINA BEN MHENNI: «ON POURRA ME TUER, MAIS JE NE PORTERAI JAMAIS LE VOILE»

Elle a fait la révolution contre Ben Ali en janvier dernier et elle a assisté avec horreur, la semaine dernière, à la victoire électorale du parti islamiste Ennahda. Mais la jeune blogueuse de 28 ans, pressentie pour le prix Nobel de la paix, ne lâche rien et continue le combat.

Par Robert Habel - Mis en ligne le 01.11.2011
Elle parle d’une voix calme et un peu traînante, elle est très douce mais très déterminée. Lina Ben Mhenni, 28 ans, tient un blog depuis 2007, atunisiangirl.blogspot.com, où elle a mené le combat, avec une audace et un courage incroyables, contre la dictature du président Ben Ali et où elle continue d’exprimer aujourd’hui, après les élections à l’Assemblée constituante qui ont donné la semaine dernière plus de 40% des voix au parti islamiste Ennahda (Renaissance), les espoirs et les droits des Tunisiens et des Tunisiennes attachés à la démocratie et aux droits humains. Une militante, une battante!

La victoire des islamistes, c’est une douche froide pour vous?

Je m’y attendais et, d’ailleurs, j’ai boycotté cette élection pour plusieurs raisons, à commencer par la présence de partis reconstitués du RCD, le parti de Ben Ali. La révolution devait correspondre à une rupture totale avec le passé; or, cette rupture n’a pas eu lieu: les rcdistes n’ont pas été poursuivis, ils ont constitué de nouveaux partis ou ils se sont infiltrés dans d’autres partis, dont Ennahda. Le leader d’Ennahda, Ghannouchi, a dit que son parti acceptait les rcdistes propres, comme s’il pouvait y avoir des gens propres dans l’ancien parti de la dictature. En participant à ces élections, j’aurais donné de la légitimité à ces gens.

Mais les islamistes ont gagné.

Pour les gens, Ennahda, c’est le parti de Dieu, de la religion. Donc, pour eux, couper avec le passé, c’était retourner vers la religion, élire un parti religieux, islamiste. En plus, Ennahda est un parti bien organisé, il a dépensé beaucoup d’argent, il a acheté des voix, il a fait de la manipulation…

La révolution menée au nom des libertés va déboucher sur l’islamisme?

C’est un risque, malheureusement! Mais la majorité des électeurs d’Ennahda n’a pas adhéré à ce parti pour son programme. Ennahda a promis par exemple de créer 600 000 postes de travail en deux ans. (Rire.) On verra s’il y arrive…

Leur vrai programme, c’est la charia, c’est la suppression des droits des femmes, etc.

Leur discours est ambigu, mais il est dirigé d’abord contre les femmes. Leur candidate emblématique est une femme non voilée, qui se dit indépendante. On propose son nom pour la présidence de l’Assemblée constituante. C’est un piège! Elle a déjà commencé par parler des boîtes de nuit: elle dit qu’elle veut les conserver, mais en changeant les règles. Elle dit que les boîtes de nuit sont des endroits où il n’y a pas de morale et elle sousentend qu’elles pourraient être réservées aux touristes. C’est grave de la part d’une femme qui a toujours vécu dans un pays touristique et qui sait que les jeunes Tunisiens sont des jeunes libres. Un autre responsable islamiste parle d’interdire la mixité à l’école, c’est effrayant, on va retourner plusieurs siècles en arrière.

Les islamistes parlent aussi d’interdire l’alcool.

Ils sont dans une logique d’interdiction. Ce sont des obscurantistes et ils risquent d’utiliser la violence pour imposer leur loi. C’est très dangereux. Ils vont le faire de manière intelligente, par étapes, prudemment, mais ils vont le faire. Les libertés sont menacées: on sent déjà de la tension dans la rue. Des filles sont harcelées parce qu’elles ne portent pas le voile. Elles sont en jean et en T-shirt, et des gens les prennent à partie en leur disant: «Tu es nue, va t’habiller!»

On vous a déjà agressée parce que vous ne portez pas le voile?

Moi non, mais plusieurs de mes amies l’ont été.

Si le voile devient obligatoire, vous serez obligée de le porter.

Jamais! Je ne porterai jamais le voile! C’est le symbole de la soumission de la femme et je ne le mettrai jamais. Ils pourront me tuer et je suis prête à mourir, mais je défendrai ma liberté jusqu’au bout.

Vous êtes croyante?

Oui, je suis musulmane, croyante mais pas pratiquante.

Les femmes sont les premières visées, aujourd’hui.

Oui, tous les droits qu’on a obtenus avec le Code du statut personnel, promulgué par Bourguiba il y a cinquante ans, sont aujourd’hui en danger. Et ça me fait peur! Quand les Tunisiens ont fait la révolution, c’était pour avoir davantage de libertés et, là, on se retrouve dans une impasse. Les islamistes sont venus voler notre révolution. Ils ont confisqué la révolution. Mais les Tunisiennes ne se laisseront pas faire: il y a 24% de femmes élues dans l’Assemblée constituante.

Vous ne commencez pas à regretter le régime de Ben Ali?

Non, je ne le regretterai jamais. Ben Ali devait partir, mais son système est toujours en place. On n’a pas mené cette révolution jusqu’au bout. Il aurait fallu exclure les collaborateurs de Ben Ali de la vie politique, ce qui n’a pas été fait. Ils ont gardé le monopole des ministères, comme le Ministère de l’intérieur, ils ont la main sur les médias, sur les juges…

Les islamistes veulent rétablir la polygamie?

Oui, Ghannouchi a déclaré qu’il n’allait pas interdire la polygamie. C’est grave, c’est très grave. La Tunisie était un exemple pour les autres pays arabes, et maintenant elle risque d’être l’exemple de la régression. Je suis désespérée, mais je ne baisse pas les bras. Je me sentais étrangère dans mon propre pays sous Ben Ali, j’espère que je ne vais pas me sentir de nouveau étrangère chez moi sous une dictature islamique.

Etes-vous de nouveau surveillée et suivie dans la rue, comme sous Ben Ali?

Ces derniers jours, oui. Depuis que j’ai déclaré que je boycottais les élections, j’ai eu trois jours horribles où je revoyais devant chez moi les mêmes voitures, les mêmes indicateurs. Ils ont disparu quand j’ai commencé à parler de cela sur Facebook et à la télévision. Et puis, de toute façon, mon téléphone est sur écoute.

Vous craignez pour votre sécurité?

Oui, j’ai peur, c’est normal. Mais en même temps j’assume. Je suis pour la vraie liberté, pas celle des islamistes. Je crois que chacun est libre de sa vie, de sa religion, de ses croyances.

La vague de fond islamiste semble si large et si puissante qu’il va être difficile de l’arrêter.

Oui, et puis ils sont soutenus par des pays étrangers. Les Etats-Unis jouent le jeu d’un islam modéré, sur le modèle de la Turquie. Mais cette histoire d’islam modéré, je n’y crois pas. Je pense que la religion, c’est spirituel, c’est entre l’individu et Dieu. Les gens d’Ennahda veulent interpréter les textes sacrés comme ils le veulent, ils veulent donner des interprétations qui conviennent le plus à leur programme.

Vous ne regrettez pas la chute de Ben Ali ou de Kadhafi?

Je ne peux pas parler pour les Libyens, mais en tout cas, en Tunisie, je ne regretterai jamais le renversement de Ben Ali. C’était un dictateur. En Libye, quand je vois les déclarations de Jibril qui veut rétablir la charia et la polygamie, je me dis que c’est catastrophique. Ces gens sont des malades.

Mais Ben Ali respectait les droits des femmes.

Ça faisait partie de sa propagande. C’est vrai qu’il respectait les droits des femmes, mais il n’a pas respecté les islamistes qui ont été torturés. C’étaient aussi des Tunisiens, c’étaient aussi des êtres humains et ils ont subi la répression, eux aussi. Une dictature, c’est une dictature, il n’y a pas de différence pour moi. Les gens qui ont renversé Ben Ali pourront renverser une nouvelle dictature. Je me considère désormais comme une éternelle opposante! (Rire.)

La contestation continue aujourd’hui en Syrie. Faut-il renverser Assad ou le considérer comme un rempart contre l’islamisme?

Il faut le renverser! C’est un dictateur!

Donc, on va mettre au pouvoir un nouveau régime islamique?

C’est au peuple de choisir! Toute dictature doit être renversée. Ben Ali nous a massacrés pendant vingt-trois ans parce qu’il s’est présenté comme un rempart contre l’islamisme. Ce n’était pas une raison pour le garder.

Ce n’était pas un moindre mal?

Non! Il fallait se débarrasser de cette dictature et continuer ensuite la bataille contre toute forme de dictature. On a renversé Ben Ali et, si nécessaire, il faudra continuer la bataille. Même si Che Guevara n’est pas un bon exemple parce qu’il a été lui aussi sanguinaire et que je suis contre toute violence, je pense comme lui qu’un révolutionnaire ne démissionne jamais. Même si je ne peux profiter demain de la liberté qu’on a conquise, ce sera pour les générations suivantes.

Comment voyez-vous votre action dans les semaines qui viennent?

Je vais continuer à vivre normalement, à écrire, à bloguer, à travailler. Mais, s’il faut mobiliser les gens ou ressortir dans la rue, je serai présente.

Vous avez été nommée pour le prix Nobel de la paix, mais vous ne l’avez pas obtenu. Etes-vous déçue?

Non, pas du tout! Quand j’ai commencé ma bataille, ce n’était pas pour avoir des prix. C’était pour la liberté! Quand je vois maintenant que les gens m’arrêtent dans la rue pour m’embrasser et me dire qu’ils sont fiers de moi, c’est plus extraordinaire que tous les prix du monde. Quand j’ai commencé à écrire, je m’attendais à être arrêtée, emprisonnée, torturée, je ne m’attendais pas à des prix. Et puis, pendant toute la semaine où mon nom circulait pour le prix Nobel, j’ai été attaquée sur Facebook par des islamistes, j’ai été harcelée par les médias, je n’avais plus le temps de manger et de dormir. J’ai failli faire une dépression. Donc, je me suis sentie soulagée quand je n’ai pas eu le prix.

Ça n’aurait pas été une certaine protection pour la suite?

Je me sens déjà protégée un peu, car je suis médiatisée. Je suis heureuse aussi, parce qu’on a inspiré le monde entier. Dans le monde arabe, le courant islamiste a confisqué la révolution, mais quand on voit ce qui s’est passé en Espagne, en Grèce, en Géorgie, aux Etats-Unis, on a été le point de départ de certains mouvements révolutionnaires. Et ça, ça me donne de l’espoir. Avec Ben Ali, j’étais une personne qui dérangeait et aujourd’hui je continue à être une personne qui dérange. Mais moi, ça ne me dérange pas! (Rire.)

mardi 1 novembre 2011

Islam y democracia

El humorista del diario tunecino nos presenta a dos personajes que conversan. Uno de ellos expresa su miedo ante la llegada al poder de los islamistas, y cuenta al otro que se ha abastecido, por si acaso, de agua y de leche. "Te equivocas", le contesta su interlocutor. "Harías mejor en almacenar vino y cerveza". Una de las imágenes habituales del islamismo le identifica con la prohibición de las bebidas alcohólicas, y de hecho, siendo Túnez país musulmán, el Gobierno ponía las cosas difíciles a los bebedores de las clases populares, reservando la venta a tenduchos semiescondidos de propiedad estatal y solo en las principales localidades. Para los consumidores de alto nivel adquisitivo y turistas. El segundo indicador de intransigencia correspondería a la islamización del vestido femenino.
De momento, las únicas señales emitidas por Rachid Ghannushi, líder de Ennahda, el Partido del Renacimiento, vencedor en las elecciones, conciernen a lo segundo y en nada anuncian la aplicación de la vulgata islamista. El modelo sería el AKP turco de Erdogan. Solo puede preocupar su crítica al hecho de que en Túnez coexistan el francés y el árabe, que a su juicio debiera ser la lengua propia del país. Por lo demás, una vez suprimidas las restricciones del régimen de Ben Ali sobre el hiyab, Ghannushi ha anunciado un futuro de coexistencia, al regresar tras un largo exilio: "Las mujeres y los hombres son libres de elegir su estilo de vida; soy contrario tanto a imponer el velo, como a prohibirlo en nombre de la modernidad". Su preocupación se vuelve hacia los problemas concretos que afectan a la mujer tunecina: el salario inferior al de los hombres, la ausencia de guarderías y algo de lo cual los espectadores españoles pueden percibir la importancia en el filme egipcio El Cairo 678: el acoso sexual. Como en el curso de la campaña electoral, la moderación ha presidido todas y cada una de las declaraciones del veterano político, aun cuando tendría razones para quejarse por un sistema electoral que castigó a Ennahda como partido ganador, impidiendo su clara mayoría absoluta en la Asamblea Constituyente.
Bajo la bandera del islam, la democracia parece haber llegado a Túnez, no sin seguir un recorrido sinuoso, ya que el factor religioso no contó en la insurrección contra Ben Ali y los grupos progresistas han tenido pésimos resultados. Incluso entró en escena un factor inesperado, con el millonario residente en Londres que obtuvo casi el 10% de los votos haciendo campaña solo desde su televisión. Pero el sustrato islámico estaba lo suficientemente arraigado en la sociedad tunecina como para imponerse, más aún si su portavoz político desarrollaba una campaña abierta a la tolerancia y al pluralismo de cara al futuro.
En el caso de que tales previsiones optimistas se confirmen,se abre una nueva era en las relaciones entre la religión musulmana y la democracia, que ya había tenido antecedentes teóricos en autores tunecinos como Mohamed Charfi. Recordemos su libro Islam y libertad. Frente a la restauración del orden tradicional bajo el cumplimiento estricto de la sharía que parece inevitable en Libia, el nuevo régimen tunecino puede ofrecer un ejemplo de mayores consecuencias que el de Turquía, ya que en este caso existía el antecedente de Kemal Ataturk, con todo su legado de defensa del laicismo y, además, por encima de las creencias comunes, no se trata de un país árabe como Túnez. Lo que si conviene es tener en cuenta que si el islamismo turco, de posiciones radicales a mediados de los años noventa, parece haberse ajustado al patrón de la democracia, el tunecino puede seguir el mismo camino, guiado aquí por el conocimiento del grado de evolución de la sociedad que tendrá Ennahda a su cargo.
Como consecuencia, resulta cuestionable llamar "islamista" a un Gobierno que renuncie a implantar la sharía, adopte una Constitución democrática y promueva el pluralismo político. Es útil llamar a las cosas por su nombre. El islamismo tiene una seña de identidad clara que es la adopción de la sharía, del conjunto de normas basadas en el Corán y en las sentencias del profeta, con el objeto de mantener o forjar un orden social regido en su totalidad por el principio de "ordenar el bien y prohibir el mal" cuyo contenido marcan los textos sagrados. Fue el programa tradicional de los Hermanos Musulmanes de Egipto, de los cuales procede Ennahda, y lo es hoy de los principales movimientos islamistas en el mundo. No lo es, según sus palabras, de Ennahda. Partido islámico o simplemente musulmán sería una calificación más ajustada.
Es la ocasión también para distinguir entre islam e islamismo, en el sentido de la tradición doctrinal, tantas veces olvidada, del islam progresivo. Desde que en 1925 Ali Abderraziq, teólogo de la Universidad de Al-Azhar, afirmara la posibilidad (y la necesidad) para los musulmanes de elaborar una doctrina moderna del Estado, al poner en cuestión el califato como institución divina, una corriente minoritaria de pensamiento, pero de argumentación sólida, ha sentado los fundamentos de una convergencia entre islam y democracia. En su base está la idea de que la enseñanza del profeta no determina forma alguna de Gobierno en particular. La construcción teológica contenida en la primera parte del Corán, las aleyas de La Meca, es de naturaleza fundamentalmente religiosa, contempla la yihad como esfuerzo hacia Dios y no contiene un mensaje político vinculante; incluso en la fase medinense del profeta armado, en el llamado "versículo de los emires", la autoridad es vista desde el ángulo de la obediencia debida a quien la ejerce legítimamente. Insistiendo en el mismo punto, el profesor marroquí Mohamed al-Jabri, en La razón política en el islam, recordaba que la doctrina islámica no era asociable con ninguna forma política concreta y que, en todo caso, aquí en directo enfrentamiento con los islamistas, la referencia a la consulta (shura) del profeta con sus compañeros sería un antecedente de las formas democráticas de organización del poder. Aun desde juicios históricos discutibles, más allá va aún Fátima Mernissi, al asociar la democracia y el concepto islámico de razón con las mujeres creyentes, asumiendo el papel de vanguardia de esa lucha para poner fin a un orden social fundado sobre "la ocultación de lo femenino".
Como ocurriera con la formación del cristianismo democrático en el siglo XIX, al buscar refugio en los Evangelios frente a la Iglesia oficial, el islam democrático se remonta a "la inspiración de los orígenes", perdida luego con las elaboraciones de los "piadosos antepasados", referencia esencial del islamismo, con el propósito de combatir la idea de que la doctrina islámica es una ortodoxia irreformable. Citemos Islam y modernidad, del también tunecino Abdelmajid Charfi. El dato de la crítica de Ghannushi al salafismo y al radical Sayyid Qutb, fundador del yihadismo moderno, mostraría su alineamiento con dicho enfoque.
En fin, la lectura democrática del islam no solo responde en los últimos tiempos a una evolución en el terreno de las ideas, sino también a la constatación del carácter opresivo del islamismo realmente existente. Es así como el pensamiento musulmán progresista surgió con fuerza en Irán al percibir destacados participantes en la "revolución de los ayatolás" el precio de la ausencia de democracia. Frente al islam de la identidad, Abdelkarim Soroush propugnará un islam de la razón, cuya acción crítica debe permitir la distinción entre los aspectos nucleares y los accesorios de la religión. Lo esencial es sembrar "la cultura de la democracia", explicó el ayatolá Montazeri, sucesor designado de Jomeini que este apartó a última hora. La fallida revolución verde resulta de estos antecedentes. Esperemos que la experiencia de la vida en democracia y una prolongada oposición a la dictadura desde el exilio hayan movido las posiciones políticas de Ennahda en la misma dirección.

Presidente de PE analiza con tunecinos la separación entre religión y estado

Túnez, 31 oct (EFE).- El presidente del Parlamento Europeo, Jerzy Buzek, se reunió hoy en Túnez con los líderes de los cuatro partidos que compondrán la Asamblea Nacional Constituyente tunecina, con quienes abordó el asunto de la separación entre la religión y el Estado.
En una conferencia de prensa al término de su visita de dos días a Túnez, Buzek afirmó que "es importante saber que la religión puede estar separada del Estado" y dijo que había transmitido a los nuevos representantes surgidos de las elecciones del pasado día 23 la idea de que "la cooperación es posible pero tiene que haber una compatibilidad" entre ambas partes.
"Todos creemos en una democracia y ¿por qué no una democracia islámica cuando en Europa existe la democracia cristiana?", puntualizó Buzek, el primer alto dirigente europeo que visita Túnez tras los comicios.
El presidente de la Eurocámara aseguró que durante la entrevista que mantuvo con Hamadi Yabali, secretario general del partido islamista moderado En Nahda, la fuerza ganadora de los comicios, este "no pronunció ni una vez la palabra islámico" y expresó su compromiso en la construcción de una democracia como prioridad del futuro inmediato.
Buzek transmitió también "la importancia de que la libertad de opinión, de expresión y la igualdad entre los sexos queden fijadas en los textos", en referencia a la nueva constitución que la Asamblea deberá redactar.
"No podemos imponer nada a un pueblo libre, ni dar lecciones, ni Europa discute los resultados de las elecciones", dijo Buzek.
En referencia a los comicios, Buzek subrayó que "han sido libres, transparentes y plurales" y han estado "reconocidos por la comunidad internacional", por lo que considera que las irregularidades que estudia el Tribunal Administrativo "no van a cambiar los resultados".
"Europa no discute los resultados de las elecciones", recalcó Buzek.
El presidente del Parlamento Europeo reconoció que la situación económica por la que pasa Túnez "es difícil" pero insistió en que "las ayudas y los acuerdos alcanzados con la Unión Europea son un importante apoyo para la construcción democrática del país", al tiempo que manifestó la necesidad de apoyar los sectores turístico, industrial y de comercio exterior.
"Una buena reforma jurídica que acompañe la apertura de los mercados ofrecerá seguridad a los inversores extranjeros", manifestó.
Durante su visita, el presidente de la Eurocámara se entrevistó con el primer ministro tunecino, Beyi Caid Essebsi, y visitó un campo de refugiados en la frontera con Libia