Peu de personnes avaient pressenti l'ampleur des conséquences des semaines de soulèvement populaire en Tunisie. Le 14 janvier 2011, l'ancien président tunisien Ben Ali a dû fuir son pays. Cinq jours plus tard seulement, le 19 janvier 2011, la Suisse bloquait ses avoirs éventuels en Suisse, tout comme ceux de sa famille et de ses proches. Au soir du 11 février 2011, le gouvernement suisse a pris la même décision à peine de 30 minutes après la chute du président Moubarak en Egypte. Enfin, le 24 février 2011, alors que les dirigeants libyens s'en prenaient violemment à la population de leur pays, la Suisse a décidé de bloquer avec effet immédiat les éventuels avoirs en Suisse de Mouammar Kadhafi et de son entourage. Pourquoi le gouvernement suisse a-t-il pris la décision de bloquer les avoirs de ces despotes ? Pourquoi la Suisse a-t-elle été, dans les trois cas, la première à réagir, montrant ainsi la voie à de nombreux autres États ?
La réponse est simple : c'est parce la politique que nous poursuivons est claire. Depuis 20 ans, le gouvernement suisse s'attache à écarter systématiquement les avoirs d'origine illégale de la place financière suisse. Les milieux financiers ont pris note de cette politique depuis longtemps. Les experts de renommée internationale reconnaissent que peu de pays ont fourni autant d'efforts dans ce sens ces dernières années. Un spécialiste de la Banque mondiale constatait récemment "la Suisse, refuge de l'argent sale, est une réalité qui appartient au passé ou qui convient, tout au plus, aux romans policiers".
Bien que la place financière suisse ne se positionne qu'au septième rang mondial, notre pays tient le devant de la scène en matière de restitution d'avoirs volés. Ces dernières années, aucun pays n'a égalé un tant soit peu la Suisse dans ce domaine : la somme des fonds rendus à leur pays d'origine s'élève à 1,7 milliard de dollars américains.
Mais si la Suisse a restitué autant d'argent, serait-ce parce qu'elle accepte davantage d'argent sale que les autres places financières ? Aujourd'hui, la concurrence entre places financières est globale. La réputation et la crédibilité d'une place financière constituent des critères toujours plus importants en matière de concurrence sur le long terme. Il serait donc naïf de penser que les banques suisses peuvent se permettre de fixer des standards plus laxistes que ceux de leurs concurrents. Nos succès, nous les devons bien plus aux réformes de la politique suisse. Au cours des dernières années, le gouvernement et le Parlement ont renforcé les lois existantes et en ont créé de nouvelles ; les lacunes ont été identifiées et les lois ont été améliorées en fonction. À bien des égards, les dispositions suisses actuelles vont plus loin que la législation d'autres pays et font office de modèle. Le dernier exemple en date est la loi sur la restitution des avoirs illicites de personnes politiquement exposées, connue sous le nom de "Lex Duvalier". Les États considérés comme fragiles, généralement gangrénés par la corruption, sont peu protégés contre les agissements de leurs dirigeants. La loi suisse est une première mondiale dans ce domaine. Elle permet de restituer des avoirs à des États dont l'arsenal juridique ne permet pas d'effectuer les procédures nécessaires pour exiger le retour des biens détournés par un dictateur.
Toutefois, je reste convaincue qu'il faut en premier lieu lutter contre la corruption là où elle sévit. Le gouvernement helvétique a ainsi décidé de bloquer les comptes suisses de Ben Ali et de Moubarak pour aider les États concernés à récupérer leurs biens présumés volés par la voie juridique, dans les meilleurs délais.
Depuis le gel des avoirs tunisiens et égyptiens, ces deux pays ont déposé une demande d'entraide judiciaire auprès de la Suisse. Le travail du gouvernement helvétique a ainsi porté ses fruits et nous pouvons en être fiers.
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